Découvrez le parcours d’Anthony Babkine, cofondateur de l’association Diversidays.
En 2017, Mounira Hamdi et Anthony Babkine fondent Diversidays, l’association d’égalité des chances qui œuvre pour plus de diversité dans les métiers de la tech et du numérique. Depuis sa création Diversidays a accompagné plus de 10 000 demandeurs d’emplois et 50 acteurs de la tech. Dans le cadre du programme 13M, nous avons rencontré Anthony Babkine, cofondateur.
Bonjour Anthony, peux-tu te présenter ?
Je m’appelle Anthony Babkine et j’ai cofondé l’association d’égalité des chances Diversidays en 2017.
J’ai grandi au Sud de Paris, à Évry-Courcouronnes et j’ai pour habitude de dire que dans ma vie, j’ai eu trois bonnes fées. Mes parents, qui m’ont accompagné tout au long de mon parcours alors que je n’étais pas un bon élève, certains professeurs, qui m’ont aidé à avoir le bac et à ne pas lâcher, et enfin des associations d’égalité des chances qui m’ont permis de voir grand pour mon avenir. Grâce à toutes ces personnes et à ces rencontres, j’ai pu imaginer des trajectoires de vie que je n’aurais pas envisagées autrement.
Avant la création de Diversidays, avais-tu déjà envisagé l’entrepreneuriat ? Qu’est-ce qui t’a poussé à prendre ce chemin ?
Le chemin de l’entrepreneuriat n’a pas été pris par hasard, puisqu’il m’a été transmis par mon papa, qui entreprend dans le secteur de la musique.
Avant Diversidays, j’avais déjà tenté de me lancer dans l’entrepreneuriat. Malheureusement, j’ai très vite compris qu’il allait me manquer trois éléments clés : le réseau, le financement et la confiance en moi.
Quand on est peu ou mal accompagné·e, on peut très vite douter de sa légitimité et de la valeur de ce qu’on peut apporter. Avec Diversidays, nous voulons aider les personnes qui ont le potentiel, l’idée, qui veulent avoir un impact positif sur la société, mais qui n’ont pas toutes les cartes en main pour réussir.
Tu décris très souvent le numérique comme “l’ascenseur social du 21e siècle”, qu’est-ce que cela signifie pour toi ?
Je suis absolument convaincu que d’ici 2030, la compétence numérique sera indispensable sur le marché du travail français et européen. Pourtant, beaucoup de personnes ne se donnent pas la chance d’aller vers ces métiers, principalement en raison de clichés et d’idées préconçues.
Avec Diversidays, nous valorisons les opportunités proposées par les métiers du numérique pour encourager toutes les personnes à s’orienter ou se réorienter vers ce secteur.
La pénurie de candidats représente un enjeu majeur sur le marché de l’emploi. Il faut donc faire savoir au plus grand nombre que ces métiers sont ouverts et très divers. Les emplois du numérique constituent une famille de plus de 800 métiers, vous pouvez aussi bien travailler dans les jeux vidéos, dans la Cybersécurité que faire de l’UX/UI Design. Ce sont les opportunités de demain !
On te décrit souvent comme “l’entrepreneur de l’égalité des chances”. C’est quoi l’égalité des chances et comment fait-on pour l’atteindre ?
L’égalité des chances c’est le fait de donner, au départ, des opportunités égales au plus grand nombre. Ce n’est pas du tout le cas aujourd’hui, en France d’ailleurs, il faut six générations pour changer de classe sociale. Cela veut dire que si vous venez d’un milieu moins aisé, vous mettrez beaucoup plus de temps à vous élever socialement.
Mon challenge, c’est de réduire cet écart et de faciliter pour le plus grand nombre l’accès aux opportunités. Des solutions existent pour accélérer les choses et il faut en parler.
Aujourd’hui, par exemple, nous sommes à NECC, tiers-lieu numérique et inclusif à Vaulx-en-Velin. Cet endroit fournit – entre autres – l’opportunité de se former aux métiers du numérique de manière différente, par le prisme des jeux vidéos, du collectif, de la rencontre et de l’échange.
Des initiatives comme celles-ci, et comme Diversidays, montrent que dans le numérique, on trouve de très bonnes opportunités professionnelles, en CDI, bien payées, où l’on peut s’exprimer, avec du “fun” en prime.
Aujourd’hui Diversidays a trois programmes d’accompagnement, quels sont les objectifs de chacun ?
Dès le départ, nous nous sommes orienté·es vers les sujets d’impact. Ce choix a été fortement influencé par mon entreprise personnelle, fondée quelques années plus tôt. Je voulais aider des entreprises de la tech sur les sujets d’impact. C’était la première proposition de l’association, que nous avons concrétisée avec le programme Leadership.
Lorsque l’épidémie du Covid est survenue, nous avons compris qu’il fallait également aider des personnes qui souhaitaient se reconvertir. Nous avons donc créé Déclics Numériques, un programme qui permet à toutes et tous de se réorienter et de briguer un poste dans les métiers du numérique et de la tech.
Enfin, nous avons lancé le mouvement d’inclusion TechYourPlace, qui réunit 50 acteurs de la tech (fonds d’investissements, start-up…). Le principe est de les aider à réfléchir différemment sur la notion de talent, et à revoir en conséquence leur politique de recrutement, de diversité et d’inclusion. Parce que c’est une chose que de se former aux métiers de la tech et du numérique ; c’en est une autre que de trouver sa place dans ce milieu, et les entreprises doivent elles aussi s’inscrire dans une démarche d’inclusion pour que la rencontre ait lieu.
Depuis 2017, Diversidays a aidé 10 000 demandeurs d’emplois et 50 acteurs de la tech : comment vos cibles vous identifient ?
Aujourd’hui, notre force c’est de travailler avec tous les acteurs locaux, de Pôle Emploi à l’Apec, en passant par les associations, les missions locales, les centres de formations, l’Agefiph ; nous comptons aussi, parmi nos soutiens, de grandes entreprises comme Google.org ou encore Axa.
Toutes ces relations nous permettent de concevoir des programmes réellement inclusifs. Aujourd’hui, 15 % de nos bénéficiaires sont en situation de handicap, 25 % sont au RSA et 65 % sont des femmes. Nos bénéficiaires ont conscience que nos programmes s’adaptent à eux et on essaye de leur montrer des parcours qui leurs ressemblent.
Cependant, ce chiffre de 10 000 personnes ne signifie pas grand-chose pour moi. Ce qui m’importe, en revanche, c’est que 25 % de nos bénéficiaires ont repris la route de la formation et que 35 % d’entre eux/elles ont repris la route de l’emploi. Ce sont ces chiffres qui me portent et me donnent envie d’aller plus loin. D’ici 2025, on s’est donné pour objectif d’accompagner 10 000 personnes de plus !
Pour toutes celles et ceux qui ont envie de travailler avec nous, la porte est ouverte : contact@diversidays.com
Plus de 13 millions de français sont exclus du numérique. Quelles sont les actions indispensables à mettre en place ?
Pour ces 13 millions de français·es, le numérique pose encore problème : manque de connectivité, de formation, d’équipements, manque d’intérêt immédiat etc.
Je pense qu’il faut plus de centres de proximité pour expliquer ce qu’est un équipement informatique, comment on navigue sur internet, quels sont les intérêts au quotidien. On parle parfois d’illectronisme, un mot dont le sens est très fort : il signifie qu’au même titre que l’illettrisme, toute personne qui ne maîtrise pas les compétences numériques sera en difficulté, au quotidien.
À mon sens, il y donc un véritable enjeu de proximité. Cela passe par la création de liens entre des associations comme Diversidays, les entreprises privées et les pouvoirs publics. C’est le trio gagnant pour que la démarche fonctionne !
Quels conseils peux-tu donner aux entrepreneurs qui veulent inventer de nouveaux modèles ?
Premièrement, ne pas rester dans son coin ! Je pense que l’entrepreneur·e du 21e siècle est ouvert·e à la rencontre, se rend dans tous les lieux de co-création pour être en contact avec le monde et tester son idée, et favorise le travail collectif.
Deuxième conseil : se renseigner sur toutes les opportunités de financements disponibles pour que “l’argent” ne soit jamais un frein. J’ai eu ce problème là par le passé et ça m’a malheureusement freiné dans mon projet. Si j’avais su, j’aurais peut-être pris le risque à ce moment-là de financer mon projet par différents leviers.
Troisièmement, il existe un grand nombre de structures et programmes d’accompagnement. D’où mon conseil aux entrepreneur·es : renseignez-vous ! Certes, les opportunités ne se trouvent pas toujours près des banlieues et des zones rurales, et l’information à leur égard ne circule pas toujours comme elle le devrait. Néanmoins, elles existent ! Candidatez, tentez votre chance, vous n’avez rien à perdre.
Que peut-on te souhaiter pour la suite ?
Qu’avec les personnes qui agissent à mes côtés, nous puissions poursuivre notre déploiement territorial pour aider toujours plus de personnes. Je remercie d’ailleurs nos partenaires et bénévoles, engagé·es à nos côtés, qui permettent à l’association de vivre et se développer un peu plus chaque jour.
Ce que vous pouvez me souhaiter d’autre, c’est de réussir la 2ème édition de notre événement dédié à l’inclusion et à l’égalité des chances, Uniques. En 2021, nous avions réuni 1200 personnes à l’Olympia pour célébrer et promouvoir l’égalité des chances. Nous souhaitons qu’Uniques devienne le rendez-vous incontournable de l’égalité des chances en France.
J’espère que je pourrai très vite vous donner rendez-vous en 2024 !